En Vert et contre Ronald

Les Verts de la Rochelle ont refusé de voter la subvention de 1 000 euros que la ville a accordée au Mac Do Iron Kid Tour, une épreuve sportive organisée depuis plusieurs années par la chaine de fast food pour promouvoir la pratique du triathlon auprès des jeunes. Ils accusent la municipalité de la Rochelle de « subventionner la malbouffe » ainsi qu’une « pseudo-épreuve sportive (...), une façon déguisée pour l’entreprise de se faire de la publicité2  ». Il est vrai que les griefs que l’on peut retenir à l’encontre des chaines de restaurations, et notamment de celle-ci3 , sont nombreux.

Mais voilà un sursaut d’éthique de la part des Verts rochelais dont on aurait aimé qu’ils fissent preuve lorsqu’il s’est agi de développer les zones franches urbaines (ZFU) sur La Rochelle. Car c’est avec la bénédiction des Verts que la municipalité a fait en sorte que les quartiers de Mireuil, Laleu, La Rossignolette et La Pallice se révèlent être une aubaine fiscale depuis 2004 pour médecins, avocats ou autres architectes. Ces derniers ont juste besoin de quitter le centre-ville pour se soustraire à la taxe sur le foncier bâti, et ne plus être imposables tant que leurs revenus ne franchissent pas le seuil des 100 000 euros. Mais là, en l’occurrence, plutôt que de dénoncer une délocalisation locale et un effet d’aubaine fiscal, « les Verts se réjouissent du développement engendré par le statut de zone franche qui a ramené des activités professionnelles sur le quartier de La Pallice-Laleu4  » ! Affirmation gratuite qui, même prononcée sur un ton péremptoire, ne peut résister au fait que « depuis 13 ans qu’elles existent, aucune évaluation n’est venue mesurer le rapport efficacité-coût des zones franches urbaines5  ».

Le Mac Do Iron Kid Tour comme les ZFU sont symptomatiques de cet état d’esprit qui voudrait que si l’argent public ne vient pas à la rescousse de telle ou telle initiative privée, alors ce serait le développement économique et le lien social dans la cité qui seraient mis en péril. Mais j’ai du mal à croire que le Mac Do Iron Kid Tour ait attendu après les malheureux 1000 € de subvention de la ville, et que la position de cette dernière en tant que capitale de la Charente-Maritime n’ait pas suffi à faire de La Rochelle une des étapes de l’épreuve6 . Comme j’ai du mal à croire que pour « un professionnel de santé (49 %) qui exerçait son activité en ville et l’a transférée (49 % également) en zone franche pour bénéficier des avantages fiscaux7  », de cette délocalisation dépendait la pérennité de son activité ! Il s’agit donc, dans les deux cas, d’argent public bien mal utilisé.

Si le fait que le budget de la ville contribue à financer l’image des multinationales semble poser un problème aux Verts, on constatera qu’ils ne semblent pas se soucier que, pour partie, le budget de l’Etat soit délesté par certains opportunistes à l’affût des niches fiscales. Doit-on s’attendre à ce que prochainement les Verts de La Rochelle se « réjouissent » également que Liliane Bettencourt soit imposée à 9%, c’est-à-dire au même niveau qu’un cadre moyen8  ? Ou doit-on dénoncer « une façon déguisée pour (les Verts) de se faire de la publicité » sur le dos de Ronald ? Pour ma part, je pense que, quel que soit le budget dont il provient, l’argent public se doit de financer la solidarité nationale et l’intérêt général, et non pas faire les frais d’une optimisation fiscale qui, en l’occurrence, profite à une catégorie de la population qui est loin d’être la plus nécessiteuse.